La Saga des Familles Porcelet/Pourcelot - De la Provence jusqu’à la Bourgogne.



   Le nom de famille Porcelet/Pourcelot est repéré en Bourgogne dès le XIIIe siècle notamment avec un certain « Hugues Le Porcellet », membre du Magistrat de la Cité de Besançon dans les années 1280, qui fît élever le fameux « Hôtel Porcelet » sis actuellement rue Pasteur.

Les travaux de spécialistes des noms de famille (Anthroponymie) tels Dauzat, Carrez, Rabiet, Grammont et Souèges montrent que le patronyme Pourcelot actuellement très présent en Franche-Comté est un avatar du nom de famille Porcelet ; l’un et l’autre étant évidemment issu du sobriquet «porcelet ».

L’Histoire confirme les liens existant entre les familles qui portent ce nom fort singulier (singularité conférant au patronyme ses qualités de repère identitaire). Les historiens tels Thuriet ou Gourdon de Genouillac ont pu noter que le patronyme Porcelet existant à Besançon dès le XIIIe siècle appartient au lignage aristocratique « Porcelet d’Arles » dit encore « de Maillanne » repéré en Provence à partir du XIe siècle. Dans le Comté de Bourgogne (future Franche-Comté) le patronyme Porcelet subira en quelque deux siècles les adaptations phoniques puis calligraphiques propres à cette province qui le conduiront à Porcelot puis à Pourcelot. Cf : « Un Patronyme singulier au Royaume de Bourgogne et d’Arles » Alain Pourcelot - Ed. Théles/Elzévir - Paris 2008 p. 25-65.



Les Porcelet en Arles et en Provence :


  Grâce en particulier aux travaux du médiéviste et universitaire Martin Aurell concernant la noblesse provençale au Moyen Age, il est admis que le cognomen Porcellos ressortit à un clan familial présent dans le massif des Maures avant même le Xe siècle…Il s’agirait du valeureux Diego guerrier castillan fils du Comte Rodéric de Castille venu combattre en Provence les Sarrazins sous la bannière du Pape et de l’Église ; sa fougue comparable à celle d’un sanglier lui valut le surnom flatteur de “Porcellos” (= porc sauvage ou sanglier en provençal ancien) qu’il transmit à ses descendants. Cf : « Une famille de la Noblesse provençale au Moyen Age : les Porcelet » Martin Aurell - Ed. Archives du Sud, Aubanel - 1986.

Dès le XIe siècle « les Porcellos » sont installés par le Comte de Provence dans un fief important : le Bourg-Vieux d’Arles (on parle alors volontiers du Bourg-Vieux des Porcellets). À partir de la Camargue qu’ils dominent totalement les « Porcelet d’Arles » conquièrent de nombreux fiefs dans la Vallée du Rhône et les Alpilles : Fos, Lambesc, Chateauvieux…Certains membres de la noble famille Porcelet (d’Arles puis de Maillanne) s’illustreront durant les Croisades sous la bannière de Raymond de Saint Gilles et se fixent dans le Comté de Tripoli où ils tiennent des fiefs pendant deux siècles jusqu’à la prise de Saint Jean d’Acre par les Mameloucks en 1291…

Plusieurs personnages illustres appartenant aux Porcelet d’Arles jouent un rôle important auprès des Rois angevins de Sicile et Naples (XIIIe- XIVe siècle) notamment lors des Vêpres Siciliennes : règne de Charles 1er, frère du Roi de France Saint Louis. Cf : Alain Pourcelot Op. cité  p. 192- 200.

On trouve également une branche de la famille Porcelet (de Maillanne) présente en Lorraine à partir du XVe siècle avec par exemple le puissant Evêque-Comte de Toul Jean de Porcelet de Maillanne qui fonde la ville de Porcelette (Meurthe et Moselle) vers 1610.

Il est admis que les notables portant le nom « Porcelet » présents à Besançon (Magistrat de la Cité impériale, Cogouverneurs, marchands, banquiers etc…) à partir de 1250 et pendant 200 ans sont issus de villes de Lombardie et de Compagnies marchandes installées dans la péninsule italienne (Venise, Gênes, Pise …) à la faveur du commerce avec l’Orient, au temps des Croisades. Les “lombards” Porcelet de Besançon descendent de Croisés de la famille Porcelet d’Arles installés au Levant où ils sont connus sous le nom de « Porcelet de Syrie » ou « de Terre Sainte » aux XIIe et XIIIe siècles.

Pour le Comté de Bourgogne, le patronyme Porcelet a connu très tôt l’anoblissement : très précisément en 1313 avec le Co-gouverneur « Jean Porcelet » anobli par l’Empereur Henry VII à l’occasion de la réunion de la Diète d’Empire à Worms.

Cf : Histoire de Besançon, Tome I - C.Fohlen, Ed. N.L.F., Paris, 1964.


Les Porcelet/Pourcelot en Bourgogne (Duché et Comté) :


   La fin du XIVe siècle correspond au moment où la langue franco-provençale se substitue au latin dans la rédaction des Actes administratifs et privés dans le Comté de Bourgogne ; le nom de la famille « Porcelletti » va alors connaître de nombreuses variations et fantaisies calligraphiques conséquences d’une orthographe réputée flottante ! Les formes les plus classiques sont : Porcelet, Pourcelat, Pourceloiz, Porcelot et Pourcelot accompagnées ou non de la particule “le” ou “de ”. Dans la littérature on peut donc rencontrer « de Porcelet » ou « de Pourcelot » etc.

Nous écrirons par convention Porcelet/Pourcelot pour les familles repérées aux XVe-XVIIe siècles en Bourgogne ; ce qui est conforme à l’analyse du spécialiste Jacques Souèges : « En Franche-Comté, les noms de famille Porcelet, Porcelot puis Pourcelot sont des avatars de l’illustre patronyme d’Hugo Porcelletti Co-gouverneur de Besançon en 1312… ».  Cf : « Le Petit Atlas patronymique du Doubs » Jacques Souèges – Ed. Cêtre, Besançon 1980.


Le nom de famille Porcelet/Pourcelot apparaît dès la fin du XIVème siècle dans la littérature historique concernant la Franche-Comté : il est cité dans l’entourage des maîtres de la Bourgogne, ce qui témoigne de sa notoriété.


- Le patronyme Pourcelot est présent dans l’entourage de Jean Sans Peur, alors Comte de Nevers, avec le “Chevalier Jean le Pourcelot” participant en 1396 avec le futur Duc à la Croisade bourguignonne contre le sultan Bajazet 1er.

Cette expédition va connaître un échec retentissant devant Nicopolis. Les Archives du royaume de Hongrie précisent que Jean le Pourcelot est au nombre des vingt-quatre chevaliers bourguignons faits prisonniers puis mis à rançons par le sultan. Il est rapporté qu’à la demande du Roi de Hongrie, Sigismond de Luxembourg, il aura une gratification de 200F de la part du Duc Jean Sans Peur en Novembre 1406.

En 1412 Jean le Pourcelot recevra du Duc de Bourgogne le château de Thoraise qui domine une boucle du Doubs en aval de Besançon - (cf Constant Pourcelot, Bruxelles - Inédit).


- En 1401Jean Porcelet/Pourcelot alors co-gouverneur de Besançon est envoyé en mission à Paris par le magistrat de la Cité Impériale auprès du Roi de France Charles VI. Il est accompagné par deux autres notables : Richard de Chancey et Jean d’Autreille (A.C de Besançon n°1125).


- Ce même personnage est mentionné par l’érudit comtois J.J. Chifflet dans son “Vesontio” publié à Lyon en 1618 : “Le chevalier Jehan Porcelet/Pourcelot conduit une milice bourgeoise levée par le magistrat bisontin afin de porter secours à Jean Sans Peur alors aux prises avec un parti d’Ecorcheurs devant la maison-forte de Vellexon”. L’historien de Barante dans Histoire des Ducs de Bourgogne situe l’événement en 1409.


- Le patronyme Pourcelot est présent aux côtés du Duc de Bourgogne Jean Sans Peur à l’occasion d’une “Chevauchée d’Arras à Saint Denis en France fin janvier 1413”. Il s’agit de deux écuyers faisant partie d’importantes bannières bourguignonnes : le premier est Etienne de Pourcelot accompagnant Jean de Vergy, maréchal de Bourgogne et le second Etienne Le Pourcelot dans la bannière du Sire de Châteauvillain (cf. Claude Pourcelot, Bannelier de la Seigneurerie de Cicon au XVIIème siècle F.Barthelet SED n°27, 1985, Besançon.).


- Dans la première moitié du XVème siècle plusieurs notables Porcelet/Pourcelot occupent des charges et des offices dans le Haut Doubs notamment près de Sancey le long au pied de la forteresse de Belvoir. Il s’agit de juristes, d’ecclésiastiques ou de banquiers au service des Archevêques de Besançon ou des Comtes de Montbéliard (cf. Alain Pourcelot op. cité p258 et suiv.).


- Dans la seconde moitié du XVème siècle sont cités des Porcelet/Pourcelot appartenant au groupe des Officiers seigneuriaux au service des Cicon/Montfaucon dans la Franche-Montagne (Saint Hippolyte - Arc en Varais). A la fin du XVème siècle les “Pourcelot de Belleherbe” vont porter le titre héréditaire “Bannelier du Sire de Cicon” (cf. Les troubles de 1769 à Damprichard, C.Monneret, Barbizier n°29, 2005.).


- Le patronyme Pourcelot participe activement aux démélés entre le Royaume Capétien de Louis XI et le Duché de Bourgogne de Charles le Téméraire. En 1465 vers la fin de la “Guerre de Cent ans”, il est signalé que “Jacques Pourcelot” est “Trésorier des guerres” du puissant Duc à l’époque de la victoire du Comte de Charolais (futur Téméraire) à Monthléry sur les troupes du tout nouveau Roi de France Louis XI. On précise encore que Jacques Pourcelot a été le conseiller militaire du Capitaine des Deux Bourgognes Antoine de Luxembourg. (cf. Constant Pourcelot, Bruxelles - inédit).


- En 1481 les Banneliers Pourcelot se fixent dans l’avouerie de Passonfontaine (montagne du Doubs), grâce à l’accensement du domaine de Chante-Reine obtenu d’Henri, sire de Cicon dont ils sont les officiers (cf. F.Barthelet op.cité.). C’est le père d’Henri, Didier de Cicon pupille du dernier Comte de Montbéliard qui a hérité de la terre de Cicon dont fait partie Chante-Reine.

On notera que ce Didier est présent dans les années 1418 dans l’entourage du Duc de Bourgogne Jean Sans Peur tout comme les écuyers Pourcelot mentionnés plus haut ! Cf : « de Cicon…à la Grâce-Dieu » - Alfred Bouveresse – Imp. Marcel Bon Vesoul, 1979.


Il est admis par les historiens que tous ces personnages bien identifiés par la singularité du patronyme appartiennent à un même et seul lignage présent à Besançon dès le XIIIe siècle avec les riches lombards venus du monde des Croisades. Cf : « Les Cogouverneurs de la Cité de Besançon » Jean-Marie Thiébaud – Ed. CEGFC,1996.

Les membres issus de l’ancienne famille aristocratique provençale sont reconnus grâce au cognomen-sobriquet Porcelet qui en Franche-Comté sera fixé dès le XVe siècle et aboutira au patronyme Porcelot/Pourcelot. Cf. : Alain Pourcelot Op. cité.



Les Porcelot/Pourcelot à Passonfontaine (Doubs) et à Besançon du XVIe au XIXe siècle :



   Passonfontaine- bourg de la montagne du Doubs proche de la Suisse – est le berceau d’une famille de notables portant le nom Porcelot/Pourcelot que l’on peut suivre grâce à la pérennisation de son titre héréditaire « Bannelier de Cicon » durant la « période espagnole » de la Franche-Comté. Cette époque commence avec le prestigieux règne de l’Empereur romain-germanique Charles Quint qui administrait le Comté de Bourgogne hérité de Marie de Bourgogne, fille du Téméraire.

   Le clan familial Pourcelot est alors concentré à Passonfontaine ; les écrits mentionnent des agents seigneuriaux, des ecclésiastiques, des propriétaires fonciers et laboureurs, des maîtres d’usines, moulins et ateliers, des avocats voire des robins… La famille est intégrée aux élites comtoises ; elle possède un blason et noue des alliances matrimoniales flatteuses parmi les « gens d’état » voire les nobles « Montfaucon, Bouhelier, Vernerey ; elle participe à l’administration du Comté de Bourgogne (procureurs spéciaux, banneliers, greffiers, notaires, tabellions…) : elle compte de nombreux curés, abbés et moniales (Montbenoit, la Grâce-Dieu, Baume les Nonnes, Salins et Passonfontaine).

Le patronyme est à cette époque très peu éclaté : les recensements de 1657 à la sortie de la calamiteuse « Guerre de Dix ans » font apparaître pour la communauté villageoise de Passonfontaine au moins “sept feux” dénommés Porcelot/Pourcelot alors qu’on n’en rencontre quasiment aucun ailleurs ! Cf. : F. Barthelet Op. cité et A. Pourcelot Op. cité p. 276 – 280.

   La famille Pourcelot issue des banneliers de Cicon s’est épanouie pendant deux siècles aux alentours du château de Cicon. Les généalogistes considèrent qu’à Passonfontaine tous les Pourcelot sont parents entre eux ; Alfred Bouveresse signale encore : « les Pourcelot étaient si nombreux à Passonfontaine qu’à une certaine époque on a pu compter jusqu’à douze “Louis” Pourcelot, ce qui nécessita le recours à des sobriquets ». Cf. : A. Bouveresse Op. cité. On comprend que certains notables de cette famille et en particulier les avocats au Parlement de Franche-Comté aient pris pour nom : « Pourcelot de Passonfontaine » jusqu’à la Révolution.

  1. A.Bouveresse relève que c’est une tradition dans la famille Pourcelot de compter parmi ses membres des hommes de loi : avocats ou notaires…Dans la branche familiale dite du « Bannelier Claude » on peut citer plusieurs avocats en Parlement :


   - Jean-Baptiste (1675-1749) avocat au Parlement de Besançon fait enregistrer le blason familial par l’Administration du Roi Louis XIV juste après le Rattachement de la Province à la France. Les Pourcelot portent : « d’argent à un sanglier passant de sable sur une table de sinople » ; le Brevet en date du 09/12/1701 est paraphé du Comte d’Hozier, Grand Généalogiste de France dans le Registre pour la Bourgogne.

   - Pierre-Gaëtan (1681-1751) frère et héritier du précédent exerce et réside à Besançon où il possède un hôtel aristocratique situé Grande Rue juste en face l’église St Maurice dans laquelle un banc d’église est réservé à la famille Pourcelot. Il épouse Marie-Charlotte-Colombe de Villers appartenant à une famille noble de Vauclusotte (Montagne du Doubs) et c’est dans ce pays que s’installera leur descendance.

  - Louis-Charles-Bonaventure (1725-1798) fils du précédent est lui aussi Avocat en Parlement à Besançon. Il épouse Jeanne-Françoise Denis fille de l’officier commandant le Fort Griffon, bastion intégré aux célèbres défenses de la cité bisontine réalisées par Vauban. L.C.B. Pourcelot vendra le domaine ancestral de Chantereine à Passonfontaine ainsi que « l’hôtel Pourcelot » de la Grande Rue à Besançon. Ce notable s’installe à Vauclusotte dans la propriété de sa famille maternelle qui sera réaménagée par Pierre-Adrien Paris, Architecte à la Cour de Louis XVI. La « Maison Pourcelot » à Vauclusotte (Doubs) ainsi que le jardin à la Française attenant sont inscrits à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques.


   Deux membres de la famille Pourcelot seront élus aux assemblées des États Généraux de 1789 dont Louis-Charles-Bonaventure qui sera Député de Bailliage ; la culture aristocratique de la famille entraînera quelques ennuis avec les Comités révolutionnaires. Certains Pourcelot connaîtront même les geôles de la Conciergerie à Paris : ils avaient, il est vrai, participé très activement à un mouvement contre-révolutionnaire dans la montagne du Doubs connu sous le nom fort significatif de « Petite Vendée ».

Après la tourmente révolutionnaire, l’Empire puis la Restauration seront plus favorables à quelques notables repérés dans la région de Saint-Hippolyte (Doubs) qui, pour les Pourcelot représente quasiment le second berceau familial à côté de Passonfontaine : aujourd’hui on peut admirer à Vauclusotte l’imposante et curieuse Chapelle funéraire des Pourcelot jouxtant l’église communautaire depuis le XVIIIe siècle.

Portant le nom de Pourcelot on recense aux XVIIIe - XIXe siècles des officiers, des avocats, des médecins et même un vétérinaire ! Signalons plus spécialement le curé Antoine Pourcelot (1757-1828) titulaire de la cure de Maîche (capitale de la Franche-Montagne) à partir de 1802 ; il a sa pierre tombale à l’intérieur de l’église. Mentionnons encore Marcel Pourcelot (1759-1829), adjoint du Comte de Scey Préfet du Doubs qui termina sa carrière comme Sous-Préfet de Gex (Ain). Nous terminerons avec le Dr Pierre Philippe François Pourcelot (1764-1836) qui fut nommé Conseiller Général Inamovible du département du Doubs de 1795 à 1829. Parmi ses seize enfants : Pierre Charles Philippe (1792-1860) sera élu Conseiller Général de Saint-Hippolyte ; une de ses petites-filles Félicie épousera Charles Borne Député puis Sénateur du Doubs et son petit-fils Charles Pourcelot sera médecin à Besançon jusqu’en 1871. Cf. : F. Barthelet Op. cité et A. Pourcelot Op. cité.